Tourner une page
Ces dernières semaines, je sentais bien qu’allaiter la puce me semblait parfois une contrainte. Je m’y attelais quand même, enfouissant en moi ce sentiment de rejet. Depuis sa naissance, le mot « sevrage » me terrifiait. Un peu comme quelque chose d’angoissant, qu’il valait mieux taire. Un vrai tabou.
Mon ancienne psy avait déjà senti cette faille, elle m’en parlait parfois, comme pour démystifier la chose. Comme pour me dire qu’elle serait là, pour m’accompagner sur le chemin. Parce qu’évidemment, celle à sevrer dans cette histoire…nous savions toutes 2 que ça ne serait pas Juliette.
Pendant nos vacances de Printemps, elle n’a pas tété ni réclamé le sein de la semaine, son père s’occupant du coucher. A notre retour, elle a réclamé quelque fois, et progressivement, tendrement, les câlins ont remplacé les tétées.
Pas de cri, pas de pleur, pas de hurlement. Comme un nuage qui quitte tout doucement le ciel.
Les semaines ont passé, mais impossible de me dire que l’allaitement était fini. Non, je peux toujours y revenir, faire marche arrière… »regarde, j’ai encore du lait ! » C’était étrange. Vous voyez…comme un deuil que l’on refuse de faire.
Et puis évidemment, c’est en osant me confier à ma thérapeute que les choses se sont éclaircies…car oui, même si c’est dur de me l’avouer, encore et encore…on en revient toujours à cette difficulté première : celle de passer le relais. D’accepter qu’ils grandissent. Littéralement…de me sevrer d’eux.
Tant de culpabilité enfouie en moi jusqu’à ce billet. Et là, comme par magie, les larmes ont coulé. Le cœur s’est allégé. Non, je ne suis pas seule. Non, ce n’est pas une tare. Oui, l’allaitement est fini. Mais ce n’est pas la mort de quelque chose. Ce n’en est que le début.
Elle ne m’a jamais semblé plus grande que cette semaine. Plus dégourdie, plus bavarde, plus sûre d’elle. Si elle savait seulement à quel point je l’aime.